jeudi 14 novembre 2013

Carmes (place des)

La via Agrippa, voie romaine reliant Lyon (par Saint-Priest-Taurion et Sauviat-sur-Vige) à Saintes (par Angoulême) passait par la place des Carmes et la rue Armand-Dutreix, après avoir emprunté les rues Courteline, Baudelaire, la place Denis-Dussoubs, la rue Louvrier-de-Lajolais et le champ de foire. La place des Carmes se situe à côté de l’amphithéâtre gallo-romain démoli au début du règne de Louis XV (jardin d’Orsay). Elle servait de marché à la chaux et au vin. En 1776, le marché au blé, qui était établi dans une partie abandonnée du monastère de Saint-Martial, s’y installe « provisoirement » : il y reste jusqu’en 1875 !

La place doit son nom aux Carmes, ordre mendiant qui arrive à Limoges en 1260 et se fixe en 1264 à l’extrémité du faubourg des Arènes (rue des Arènes). Ils élèvent des bâtiments en forme de quadrilatère autour du cloître, avec, à l’est, l’église, dont la construction progresse du chœur vers la nef, du sud vers le nord. Après une première campagne d’édification (1260-1300), le chantier marque un arrêt et l’église est terminée dans la première moitié du XIVe siècle (ajout d’une cinquième chapelle et de la façade nord). Fin XVe siècle, les Carmes entament d’importants travaux achevés en 1506 : l’ancienne façade est détruite et la nef agrandie, deux chapelles supplémentaires sont créées et le clocher est bâti au-dessus du portail (remplacé en 1674 par un clocher à bulbe couvert en ardoise). Du chœur de l’église, un escalier en colimaçon permettait d’accéder à l’ancien dortoir des frères au premier étage. Au rez-de-chaussée, le chœur communiquait avec la sacristie et la salle de la communauté.

Déclarés biens nationaux en 1790, les bâtiments sont mis aux enchères en 1791 et acquis par le magistrat Jacques-Joseph Juge de Saint-Martin (Limoges, 1743-1824), également propriétaire du couvent des Cordeliers. Il procède à l’allotissement des Carmes de 1791 à 1813. Outre la vente de parcelles bâties ou non, il commercialise au détail les matériaux extraits du démontage du couvent et de l’église (charpente, couverture, dallage…). Passionné d’agriculture, il crée une pépinière sur les anciens terrains. A partir de 1792, un dénommé Dussoubs installe son atelier de faïence sur le site. Après 1843, une partie est occupée par la fabrique de faïence et porcelaine de la Pépinière. Divers porcelainiers s’établissent jusqu’à la Seconde Guerre mondiale (un décorateur sur faïence et porcelaine est en activité entre 1870 et 1900).

En 1999, la Caisse d’Epargne du Limousin, 21 place des Carmes, souhaite agrandir son agence des Carmes après le rachat du magasin de cycles Mazabraud attenant. Les fouilles permettent de dégager une partie de la nef, avec les arcades des chapelles, qui avaient été murées lors de la constitution des lots. En effet, l’église du couvent des Grands-Carmes n’est démolie qu’en partie en 1795. Quelques éléments de fresques remarquables sont aujourd’hui visibles dans les bureaux de la banque.

15 rue Neuve-des-Carmes, la sacristie et la salle de la communauté surmontées d’un dortoir n’ont pas été détruits (c’est aujourd’hui un restaurant). La sacristie avec ses deux travées à croisées d’ogives est transformée en cuisine avec l’installation d’une cheminée en 1791. La salle de la communauté ouvrait sur la galerie du cloître par au moins deux baies à remplage, dont l’une est conservée à Philadelphie. L’ancien dortoir des frères conserve des vestiges de peintures murales. Parmi les autres vestiges conservés se trouve la croix de l’église installée devant la chapelle Saint-Aurélien, acquise par les bouchers en 1791.

La place abrite, jusqu’en 1734, le reclusage de Limoges, dont la plus ancienne mention remonte au XIVe siècle. Comme l’ermite de Montjovis, la recluse, nommée par les consuls, logée, nourrie, vêtue et chauffée aux frais de la commune, a pour mission de prier Dieu pour le salut de tous.

La manufacture Pouyat, détruite, couvrait la surface de la cité de l’Amphithéâtre. Fondée en 1839 par le fils du porcelainier François Pouyat (†1838), Jean-Baptiste Pouyat (†1849), auquel succède ses trois fils, Emile (†1892), Louis (†1884) et Léonard (†1876), elle est renommée, jusqu’à sa fermeture en 1912, pour la blancheur de sa porcelaine. Les immeubles qui entourent la place sont d’époques variées (3 bis, O. Treich, 1903).

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